Le groupe
Au risque de verser dans la psychologie de comptoir, il est permis de penser que l’attrait actuel pour les sonorités des années 60 relève d’une certaine quête d’insouciance. Quelle ineffable consolation, en effet, lorsque résonnent ces guitares au son chaud, ces basses moelleuses et ces roulements de caisses on ne peut plus claires. Un rempart, non moins friable que les autres, face aux grandes peurs qui nous assaillent.
Aux côtés d’autres groupes français (La Femme, par exemple, dont il partage certaines techniques de composition), le trio Juniore suit les ornières bien tracées de l’héritage surf et pop d’un Swinging London toujours rafraîchissant, jamais éculé. Avec néanmoins cette touche française – le yéyé, encore lui – qui caractérise tout particulièrement la musique de Juniore : phrasé nonchalant, textes en français tout à la fois naïfs et joueurs, élégance minimaliste… On retrouve tous ces marqueurs dans leur dernier album intitulé Trois, deux, un. Un compte à rebours qu’on interprétera positivement, même s’il y règne, à force de parcourir ces treize titres lancinants, une forme de mélancolie désabusée qui tranche avec la chaleur originelle des sixties. C’est peut-être ici que Juniore se distingue parmi la horde de formations surf en vogue, parfois moins nuancées.
Reste à savoir à quoi peut bien ressembler un tel groupe sur scène. D’une discrétion palpable, allergique à toute forme de surenchère, Juniore ne semble pas du genre à haranguer les foules ou chorégraphier ses shows. Tout pour et par la musique, un créneau séduisant qu’il s’agira d’honorer dans la grande salle de la Source. / HV