Passage en revue de toutes les dates grenobloises du festival Les Femmes s’en mêlent, événement parisien qui se décline dans différentes villes de France. Une programmation qui, au-delà de la mise en lumière de la scène musicale féminine, fourmille de découvertes et de propositions rafraîchissantes.
/ Par Hugo Verit
Marie-Flore + Savanah
Le gros cœur écarlate ornant la pochette d’Ex-Aequo, troisième album de Marie-Flore, donne un subtil petit indice sur son contenu. Des chansons d’amour – et de rupture surtout – qui dépeignent toutes les nuances du sentiment d’abandon, entre regret, malaise et soulagement. Un album où dominent les violons, au sens figuré comme au sens propre. Quarante musiciens accompagnent ces compositions, suivant une partition orchestrale écrite par Marie-Flore elle-même (l’artiste exauce ainsi l’un de ses plus vieux rêves). Une douzaine de ballades sympathiques s’inscrivant dans la lignée d’une chanson française, finalement, assez traditionnelle.
Voilà pourquoi on a préféré l’écoute du premier EP de l’émergente Savanah, Céleste, qui partagera le plateau ce soir-là. Arpentant des chemins moins éculés, elle y témoigne sans retenue de son goût pour les atmosphères éthérées et les réverbérations infinies, ne dissimulant pas d’iconiques inspirations : Lana del Rey ou David Lynch. C’est rétro, nostalgique, et crépusculaire à l’image de son clip couleur de dunes Je ne rêve plus. Une duveteuse découverte.
Ven. 14 nov. à 20h30
La Source (Fontaine)
De 15€ à 23€
Meimuna + Gintsugi
C’est demain que je meurs, nous annonce sans prévenir Meimuna dans son premier album. Rassurons-nous néanmoins, l’artiste suisse a déjà joué plusieurs fois cette chanson sans que l’auto-prophétie ne se réalise… Il y a d’ailleurs bien plus de vie au cœur de ces morceaux folk pop chantés avec langueur, même si règne, tout du long, dans les mélodies comme dans les arrangements délicats, une certaine blessure intangible. Cette blessure insaisissable que nous cause l’imperfection du monde. S’il fallait comparer pour mieux comprendre, disons que Meimuna nous rappelle le meilleur de Pomme – le même sens de la phrase musicale, le même goût pour les ballades folk sombres et légères à la fois. Plus connue chez nos voisins suisses, la chanteuse donne quelques dates en France ces prochains mois, dont ce Club Dimanche au Ciel. Sur scène, elle sera précédée de Gintsugi, autrice d’une œuvre pop ambitieuse dont on a hâte de découvrir la suite. Son premier album très prometteur, The Elephant in the room, paru il y a deux ans, comptait de savoureux moments (Water Came en meilleur exemple).
Dim. 16 nov. à 15h30
Le Ciel
De 5€ à 15€
Liv del Estal + Copycat + Blue Laïka
La date la plus grand public de cette déclinaison grenobloise des Femmes s’en mêlent. D’abord une inconnue un peu connue : Liv del Estal dont les fans de The Voice auront suivi le joli parcours lors de la saison 7 du télé-crochet (dans la team de Zazie). Ça, c’était en 2018. Depuis, la chanteuse a opéré un virage esthétique assez radical, passant d’une variété pop plutôt basique aux martèlements électroniques de l’eurodance – genre des années 2000 revenu à la mode ces dernières temps. Saluons le revirement. Influences rétro aussi pour le phénomène annoncé Copycat, duo de cousines (donc très très complices) qui convoque un son pop-rock sautillant qu’on croyait révolu pour ériger des tubes imparables. À mi-chemin entre Thérapie Taxi et Yelle. Ou Superbus en beaucoup mieux. Blue Laïka, enfin, est l’une des rares artistes de notre scène locale à s’aventurer sur le terrain de l’hyperpop. Un tout jeune projet qu’on n’a pas encore eu l’occasion de découvrir en live.
Jeu. 20 nov. à 20h
EVE (Saint-Martin-d’Hères)
Gratuit
Joe Bel + Anita Dongilli
C’est le petit coup de cœur inattendu de cette saison. La folk pop de Joe Bel, révélée il y a quelques années par des titres comme In the morning ou No, no, a franchi une nouvelle étape avec son dernier album Family Tree. Au plaisir instinctif des mélodies, s’ajoute désormais une production plus précise, plus profonde, qu’il convient d’étudier à la loupe. Écoutes après écoutes, on redécouvre un chœur par-ci ou le beau son grave d’un piano par-là. La soirée s’annonce d’autant plus belle qu’elle signera également le retour d’Anita Dongilli sur scène. Après avoir abandonné la pop plus sage de ses débuts, la Grenobloise a durement bûché sur un nouveau projet fort ambitieux : une musique expérimentale, réalisée principalement avec sa voix céleste et son inséparable violon, le tout s’inspirant de La Divine Comédie, exquis monument de la littérature. Un voyage dantesque (au premier sens du terme, pour une fois) à travers l’Enfer, le Purgatoire et le Paradis, à la recherche de l’état de grâce.
Ven. 21 nov. à 20h30
L’Ilyade (Seyssinet-Pariset)
De 12€ à 18€
Ellah A. Thaun (annulé)
La date était annoncée depuis belle lurette, et on se faisait une joie de découvrir en live un petit mythe de la musique artisanale (41 albums au compteur sur son Bandcamp, des heures de compositions lofi, d’enregistrements 4-pistes fantomatiques qui dévient des autoroutes sonores habituelles). Ellah A. Thaun, évoluant désormais au sein d’un quatuor grunge expérimental, ne viendra finalement pas au Ciel le 12 novembre, le groupe ayant annulé « pour des raisons personnelles ».
Photo © Olivier Lovey